COVID-19 et santé mentale des Français : ce qu’il faut savoir.
Quel impact a eu l’épidémie de COVID-19 sur la santé mentale des français ?
La crise sanitaire liée à l'épidémie de COVID-19 a eu un impact sur la santé mentale des Français. L'enquête CoviPrev menée à plusieurs reprises par le ministère français de la Santé publique depuis mars 2020 a prouvé que la santé mentale de la population s'est détériorée. D’ailleurs, cette situation a fait l'objet de plusieurs signalements de professionnels (notamment des services de psychiatrie et de pédiatrie), qui impliquent une augmentation de la prise en charge des tentatives de suicide des jeunes patients et d'autres diagnostics de santé mentale.
Dans ce contexte, Santé publique France a renforcé la production des données de suivi de la santé mentale des populations, et mis en place des annonces de suivi hebdomadaires à partir des situations d'urgence et des données de SOS Médecins. Ces annonces ont pour objectif de faire comprendre à tous les acteurs de la santé mentale l'évolution de la santé mentale des français, mais aussi à sensibiliser la population à ce genre de constat.
Qui sont les plus touchés par les contrecoups psychologiques liés à la pandémie de COVID-19 ?
On remarque que ce sont les jeunes qui sont les plus touchés par les contrecoups psychologiques liés à la pandémie de COVID-19 avec 22% des 15-24 ans qui ont présenté des symptômes d’un état dépressif alors qu'ils étaient 10,1% en 2019. Ce chiffre est nettement plus élevé que celui de la moyenne des classes d’âges supérieures (12,1%). Aussi, plus d’une jeune femme sur quatre et un peu moins d’un jeune homme sur cinq sont concernés. Les chercheurs de l’étude CoviPrev notent que “ l’angoisse des jeunes adultes pouvait s’expliquer par leur tendance à chercher activement des informations sur la maladie via les réseaux sociaux. Une autre hypothèse peut être également celle d’un biais d'échantillonnage.”
On remarque également que les femmes sont particulièrement vulnérables, avec 15,8% en 2020 contre 12,5% en 2019 qui ont déclaré des symptômes évocateurs d’un état dépressif. L'étude relève notamment que “le fait de se retrouver confronté à des comportements violents, agressifs ou dégradants de la part de son conjoint ou partenaire est par ailleurs lié au syndrome dépressif”. Par ailleurs, les violences familiales ont augmenté de 9% en 2020 par rapport à 2019.
“L'une des principales caractéristiques de cette pandémie est la masse d’informations associée à une évolutivité inégalée des informations, que ce soit de la part des experts scientifiques, médicaux, des décideurs ou entre pays”
Comment la pandémie de COVID-19 a impacté l’état psychologique des français ?
Selon cette étude, plus d'un cinquième des personnes vivant dans des appartements sans balcon souffrent de dépression. Aussi, être isolé loin de chez soi, vivre dans un logement surpeuplé, ou à l'inverse, vivre seul ou seul avec son ou ses enfant(s) peut augmenter le risque de dépression. Aussi, il est important de noter que la plupart des médecins généralistes ont poursuivi leurs activités pendant la deuxième période de confinement. Par rapport au premier confinement au printemps 2020, leur activité a très légèrement diminué. 89 % des médecins ont consacré moins d'un quart de leurs activités à la COVID-19. Cependant, les demandes de consultation pour le stress, l'anxiété ou la dépression sont restées plus importantes qu'avant l'épidémie de COVID-19.
Ainsi, 72% des médecins estiment ces demandes plus fréquentes qu’avant la pandémie et 16% estiment que leur nombre a augmenté de plus de 50%. Il s’agit d’une tendance qui s'est accentuée depuis le premier confinement. Selon la DREES, ce constat est l’illustration d'une “souffrance psychologique marquée dans la population du fait des conséquences sociales et économiques et des mesures mises en place pour l'endiguer”.
Une équipe française de chercheurs en psychiatrie dans la revue L’Encéphale explique également que “l’une des principales caractéristiques de cette pandémie est la masse d’informations associée à une évolutivité inégalée des informations, que ce soit de la part des experts scientifiques, médicaux, des décideurs ou entre pays”. À cela s’ajoutent les troubles psychologiques liés à la perte d’un proche, à la peur d’être contaminé ou de contaminer son entourage, et à la raréfaction des relations sociales (amicales ou familiales). Ainsi, tous ces facteurs favorisent la montée des états anxieux, dépressifs, des problèmes de sommeil ou du stress.
« Cette augmentation reflète probablement l’impact psychologique important de l’épidémie de COVID-19 et de ses conséquences sociales, professionnelles et économiques »
Qu'en est-il pour la consommation d'anxiolytiques en France ?
Il existe une autre façon de rendre compte de l’évolution de la santé mentale des Français. En effet, la consommation de médicaments ciblant les troubles psychologiques est révélatrice. Ces données peuvent être retrouvées dans les volumineux rapports d’Epi-phare. Ainsi, dans son quatrième rapport dédié à l’usage des médicaments face à l’épidémie de COVID-19, Epi-phare note que “deux classes thérapeutiques de médicaments des troubles mentaux, les anxiolytiques et les hypnotiques, ont vu leur consommation et leur instauration accrues de manière persistante pendant et au décours du confinement “.
Si l’on compare le nombre de personnes ayant eu accès sur ordonnance à des anxiolytiques en 2020 au niveau attendu, on constate une surconsommation durant le confinement. En effet, plus de 330 000 patients supplémentaires y ont recouru en deux mois (+ 1,1 million en six mois), alors que le nombre de nouveaux patients est stable par rapport à 2019 (− 0,4 %). “Cette augmentation reflète probablement l’impact psychologique important de l’épidémie de COVID-19 et de ses conséquences sociales, professionnelles et économiques”, en concluent les auteurs du rapport.
Aussi, d’autres types de médicaments ayant pour cible les troubles mentaux ont fait aussi l’objet d’un pic de délivrances au début du confinement. En effet, les antidépresseurs ont connu la même progression que les anxiolytiques. Dans une moindre mesure, les hypnotiques, ainsi que les traitements liés aux addictions à l’alcool et aux opiacés, ont aussi progressé jusqu’à fin mars 2020.
« De l'anxiété liée à la transmission du virus, à l'impact psychologique des confinements et de l'auto-isolement, aux conséquences liées au chômage, aux difficultés financières et à l'exclusion sociale, tout le monde est affecté d'une manière ou d'une autre »
La COVID-19 aura-t-elle un impact à long terme sur la santé mentale ?
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, la pandémie de coronavirus aura un impact « à long terme » sur la santé mentale des populations. « De l'anxiété liée à la transmission du virus, à l'impact psychologique des confinements et de l'auto-isolement, aux conséquences liées au chômage, aux difficultés financières et à l'exclusion sociale, tout le monde est affecté d'une manière ou d'une autre », estime l'OMS. Ainsi, la pandémie aura un « impact à long terme et d'une grande portée », prévient l'organisation. Kyriakos Mitsotakis, premier ministre grec, explique également que « nous parlons d'un composant clé de notre santé. Il requiert une action maintenant » lors d'un forum des ministres de la région Europe de l'OMS, qui inclut 53 pays, à Athènes. « Nous devons parler ouvertement de la stigmatisation qui accompagne la santé mentale », a-t-il ajouté.
Les recommandations de l'OMS comprennent le renforcement des services de santé mentale en général, l'amélioration de l'accès aux soins grâce à la technologie numérique et l'augmentation des services de soutien psychologique pour les écoles, les universités, les agents de terrain et les agents de première ligne.
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